70 ans, l'heure du bilan : une vie en aviation en Afrique en photos

[Emikoussi]

Pendant ce temps là, je m'occupe de faire un Business Plan pour pouvoir obtenir un prêt de la banque pour l'achat de l'avion.
En Mauritanie, je vais voir les banques (BNP Paribas et Société Générale nouvellement installées dans le pays), ainsi que des banque Mauritaniennes. Le directeur de filiale Total m'accompagne à chaque fois pour m'appuyer, ce qu'il n'était pas du tout obligé de faire. Et j'ai des promesses qui me donnent confiance.
Je trouve un Beech 90F à Agen que je viens visiter, j'entreprend de faire faire des travaux dessus : équipement d'un TCAS, montage d'un train à grandes roues, etc et prépare un contrat de maintenance avec l'atelier mécanique Part 145 en France, c'est la charrue avant les boeufs.
Mais aucune banque ne suivra.
Pire, après m'avoir refusé les prêts, ces banques, et spécialement SG vont voir Total pour leur proposer de leur fournir l'avion. Le directeur de filiale les mettra dehors.
Déçu mais toujours combatif, je décide alors de faire venir un 1900D de Zimex, une compagnie Suisse spécialisée dans les opérations pétrolières que je gèrerais mais que je ne piloterais pas bien que qualifié sur le type, ne faisant pas parti de l'exploitation de cette compagnie. Nous formons des projets de collaboration future sur la sous-région, et au final le Beech 1900 de Zimex arrive avec deux pilotes et un mécanicien que nous basons sur mes installations. Je fais mes vols avec l'Aztec pour ma propre exploitation, et gère toute la logistique du Beech pour Total. Zimex est une boite vraiment très pro, et toute la durée de l'opération se passe vraiment très très bien, à l'entière satisfaction de Total.
Je gère les pilotes, l'embarquement et débarquement des passagers et du fret, positionne sur site du personnel pour les suivis radios et le traitement des départs et arrivées : toute la logistique.
Tout fonctionne vraiment très bien.
Je suis l'interface entre Total et Zimex.

[Emikoussi]

La mission va durée 11 mois, au bout desquels les opérations sont suspendues, le Beech rentre en Suisse, et on attend le prochain forage de prospection prévu dans quelques mois.
Entre temps, ayant signé un contrat avec Wintershall pour un avion de 10 places, j'achète un PA31 Chieftain en Suède que je fais rapatrier sur Nouakchott.
A partir de là les ennuis commencent : mon activité devient de plus en plus visible, et je deviens de plus en gênant pour les personnes qui rèvent de récupérer cette activité.
Le PA 31 Chieftain arrivé de Suède, lors de sa classification Mauritanienne.

[Emikoussi]

Wintershall prévoit de démarrer dans les prochains mois, mais ils sont assez lents.
Lorsque la seconde campagne de prospection Total démarre (nouveau bloc, nouvelle piste TA7), Zimex n'a pas d'avion disponible. Nous décidons de faire appel à une petite compagnie Française qui a répondu à l'appel d'offre, mais de mon côté je ne suis pas très chaud : ils n'ont aucune expérience de ce genre de mission, faisant de la petite ligne en France avec des 1900D, sur des infrastructures standards bien équipées. Mais bon, il n'y a pas le choix donc ce sont eux qui vont opérer.
Lorsque l'avion Beech 1900D arrive, ils doivent faire tout d'abord à vide une reconnaissance de piste sur site. Tout se passe bien à l'aller, mais au décollage, bien évidemment pour des pilotes non habitués à ce genre de terrains, ils mettent la puissance sur freins et détruisent leurs hélices ainsi qu'un hublot avec tous les cailloux soufflés, ils se reposent aussitôt et l'avion est inutilisable, il faut changer les deux hélices et le hublot et faire une bonne inspection des turbines pour les dégats éventuels. L'avion est immobilisé un bon moment, le temps de recevoir les éléments. Ce qui retarde les opérations de Total.
De mon côté ça se passe assez mal avec le propriétaire de cette compagnie qui est un type pas très franc du collier, et du genre les dents longues, et au final un beau salopard. Il finira d'ailleurs par me piquer tout mon personnel et continuera sans moi vers la fin de la campagne, mais il ne sera pas renouvelé par Total.
Ca sent le roussi pour moi. L'Aviation Civile commence à me poser des problèmes, surtout après un audit OACI réalisé sur cette autorité (autorités qui sont régulièrement inspectées par l'OACI pour vérifier qu'elles sont conformes aux normes).
Lors de l'audit, elles visitent les compagnies autorisées, donc elles viennent me voir, consultent ma documentation, et consulte également Air Mauritanie, compagnie nationale. Nous sommes les deux seules compagnies en Mauritanie. Lors du debriefing final, l'OACI critique lourdement Air Mauritanie, et conseille à la Direction Civile de prendre exemple sur la mienne. Evidemment ça ne plait pas, ils auraient mieux fait de se taire parce que je vais devenir à partir de là une cible à abattre. Ce qui ne va plus tarder.
Au retour d'un vol avec le Chieftain, je vais recevoir un courrier de l'Aviation Civile suspendant mon exploitation.
Le service économique de l'ambassade de France tente bien d'intervenir, mais le directeur de l'Aviation Civile prétend que je fais du trafic de drogue, ce qui est évidemment faux parce que j'aurais été dans ce cas déjà en prison.
C'est terminé, je ne peux plus rien faire. Je vais bien tenter pendant 6 mois d'obtenir un RV avec le directeur, mais il ne me recevra jamais.
Wintershall reçoit la visite de quelques prétendus "futurs" opérateurs Mauritaniens, qui ne détiennent même pas de permis d'exploitation, mais ils sont éconduits devant l'évidence du coup monté à mon égard.
Nous restons encore quelques mois puisque je continue à gérer pour le moment Total, et que les Mauritaniens ne peuvent bien sur pas arrêter cet opérateur, c'est trop important pour le pays. Mais nous décidons de laisser tomber, d'arrêter, et de passer à autre chose.
Ce sera l'achat d'une maison en France, et l'arrêt de ma carrière dans l'aviation.
Mais contre toute attente, je vais encore avoir de la chance. J'ai presque abandonné mes 3 avions sur mon espace à l'aéroport, je n'y vais que rarement et ne sais pas encore comment faire avec tout ça sur les bras. Je me concentre principalement à l'activité Total, avec laquelle je n'ai jamais aussi bien gagné ma vie, malgré que je n'opère plus d'avion.
Et un beau jour, une personne débarque et me propose de tout me racheter : hangar, véhicules, outillages et le Chieftain. Pour moi c'est juste inéspéré (mais peut-être que lui aussi est à l'origine du retrait de mon CTA. Ca fait un moment qu'il me tannait pour qu'on fasse cette activité ensemble, mais moi j'étais très bien tout seul. Et peut-être a-t-il eu quelques remords, mais je ne suis sur de rien). Quoi qu'il en soit, je lui ais donné un prix qu'il n'a pas discuté, et il m'a effectivement tout racheté. De la chance ! J'en ai eu dans ma vie finalement.
Nous voilà libéré de ce gros poids, on reste encore un peu, je vend le Navajo aux Indiens ferrailleurs, et l'Aztec pour 5000 euros à mon acheteur que je convainc d'acheter à ce prix là : c'est presque donné.

Photos de la seconde campagne Total, avec l'emplacement des équipements logistiques à Ouadane (la vieille ville que l'on voit en arrière plan), et la nouvelle piste, et les travaux de réfection de la route que Total entreprend pour faire passer leurs convois chargés du derrick :

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On va se faire quelques balades privées en Aztec dans le pays avant de partir définitivement : Tichit, Nouadhibou, Aouchich au milieu de nulle part où il reste une piste que nous avions faite avec Sphere, mais Sphere n'est plus là, et il n'y a pas âme qui vive 100 km au moins à la ronde.
Au final toutes les compagnies pétrolières et minières ont quitté le pays, ne reste aujourd'hui que la mine d'or de Tasiast, et plus aucune compagnie de transport en dehors de Air Mauritanie.
Mon acheteur n'a rien réussi à faire avec tout mon matériel qu'il a peut-être réussi à revendre, (mais peut-être pas, parce qu'il n'est vraiment pas facile de revendre des avions immatriculés en Afrique). Mais nous on s'en est finalement bien sortis,
Mashallah ! comme on dit en Mauritanie (12 ans), ou Oualaï comme on dit au Niger (8 ans) ...

Vol sur Aouchich, avec camping en Khaïma sur place :

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Week-End à Tichit :

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Week-End à Nouadhibou dans la maison d'hôtes au bord de la mer dans la Baie de l'Etoile :

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Nouadhibou :

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Et des photos oubliées : Mikaël mon neveu, et Martin mon autre neveu, venus nous visiter :

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Fin de ma carrière de pilote ? Sauf que :
https://www.checksix-forums.com/viewtop ... b#p1894765

[Emikoussi]

Nous recevrons la visite d'Hubert, copain du Niger, qui remonte une vieille 404 depuis Bobo Dioulasso vers Biarritz en passant par la plage entre Nouakchott et Nouadhibou avant que la route goudronnée ne soit construite, des pannes et la voiture qui sera presque emportée par la marée sur la plage ...
Et de profonds ensablements parfois quand on va se balader.